Saint Forent

Cathédrale

Cette église romane, une des plus belles de Corse, est connue sous le nom de Cathédrale du Nebbio, rappelant son rôle d’église-mère de cette fertile micro-région, plus tard surnommée la Conca d’Oro. Elle était dédiée à l’origine à Santa Maria Assunta. On ne connaît pas la date exacte de sa construction, mais on sait que plusieurs documents, étudiés par G. Moracchini, mentionnent déjà son existence en 1138 et 1145 ; elle apparaît comme ecclesia Sanctae Mariae Nebulensis dans un acte du cartulaire de la Chartreuse de Calci, passé en 1176 dans l’église : elle est donc à peu près contemporaine de la Canonica de Mariana, avec laquelle la ressemblance est manifeste, surtout dans la disposition intérieure à 3 nefs, peu répandue en Corse.
Un gros clocher de plan carré - abattu à la fin du XIXe siècle lors de la restauration de l’église - flanquait l’abside. Il avait probablement été édifié au début du XVIe siècle à l’instigation de Mgr Giustiniani, le savant évêque du Nebbio, qui procéda à des réparations puisque l’église (comme la bourgade qui précéda la fondation de l’actuelle cité de Saint-Florent) avait été abandonnée une première fois vers le XIIIe ou le XIVe siècle à cause de l’insécurité et de la malaria. En ces temps d’indifférence pour les églises romanes, l’évêque professait la même admiration pour ce monument si bien construit que pour la cathédrale de Mariana. 
 

 

A la fin du siècle, au plus fort de la terreur barbaresque, le site était à nouveau abandonné : un acte de 1576 mentionne une cathédrale sans toit… En 1611, on procéda à la construction d’un nouveau palais épiscopal, bientôt détruit puis reconstruit en 1714. En 1748, la cathédrale et la résidence épiscopale étaient occupées par les troupes génoises, en lutte contre les révolutionnaires corses.
En 1801, l’évêché de Nebbio fut fondu comme tous les autres dans celui d’Ajaccio ; l’église attira l’attention de Mérimée, qui la décrivit en 1839. Elle fit partie de la première vague des édifices corses classés Monument historique, en 1875, et fut restaurée à ce moment-là.
La façade occidentale est une des plus réussies de l’architecture romane corse : plus élaborée que celle de la cathédrale de Mariana, dont elle s’inspire, elle a plus de relief avec sa décoration sculptée et ses cinq arcatures aveugles du premier niveau, reprise par trois autres à l’étage, comme une projection de la nef centrale, plus élevée que les collatéraux.

 

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L’abside élancée est très comparable à celles de deux importantes églises sardes, Santa Giusta d’Oristano, construite vers 1140, et San Platano de Villaspeciosa datée de 1141 : là aussi, le relief très agréable à l’œil est produit par le remplacement des pilastres par des colonnes engagées. Mais là où une abside du XIe siècle comme celle de San Parteo de Mariana ne comporte que 4 colonnes, le maître d’œuvre loge ici 6 colonnes encadrées par 2 pilastres à la jonction avec le mur de la façade orientale, ce qui a pour effet de diminuer la taille des arcs de l’élégante corniche fortement saillante, différente par ailleurs, dans sa conception, de celle qui court en haut des murs, faite de dalles monolithes échancrées.
Cette corniche à Mariana était réservée à la façade orientale et à l’abside : là, elle se développe sur tous les murs et contribue au relief des murs latéraux ; elle permet de plus une grande variété de motifs simples sculptés dans les modillons à la retombée des petits arcs. D’autres églises de Sardaigne, du XIIe siècle comme Santa Maria di Uta, suivent alors une évolution semblable.
A l’intérieur, les similitudes avec la cathédrale de Mariana sont encore plus évidentes, du fait de la répartition de l’espace en trois nefs séparées. Avec Santa Maria Maggiore de Bonifacio (partiellement d’époque romane), la cathédrale du Nebbio fait partie des trois seules églises en état utilisant ce plan en Corse. L’église est de proportions assez comparables à la Canonica, avec toutefois une rangée en moins, et une alternance de piliers carrés coiffés d’un simple tailloir et de piliers ronds, surmontés de chapiteaux plus travaillés. Quadrupèdes gentiment féroces, serpents enroulés et motifs concentriques en forme de coquilles y rappellent joliment le décor sculpté des arcs et du linteau de la façade.
On notera enfin que, pour une fois, l’ornementation de style baroque des chapelles latérales et du chœur s’intègrent assez bien à la structure romane.
Les reliques conservées dans l’église ayant été attentivement observées par Mérimée (in Notes d’un voyage en Corse), nous lui laisserons le mot de la fin : « Trompé par des renseignements inexacts, je m’attendais à trouver, à Saint-Florent, des reliquaires anciens ; mais je n’y vis qu’une châsse toute moderne, envoyée de Rome, et contenant un squelette revêtu d’un habit de guerrier romain (vrai style d’Opéra), tout couvert de mauvais oripeaux et de verroteries. Ce sont les reliques de saint Florus qui, en compagnie de sainte Flore, a le patronage de la ville de Saint-Florent. Tous les deux sont fort vénérés dans le pays, et quelques stylets rouillés, quelques pistolets hors d’état de faire feu attestent les conversions qu’ils ont opérées. »


Laurent CHABOT
Monuments de Corse
Edisud 2003

 

 

 

      

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